[RÉGION] Contribution d'EELV Midi-Pyrénées à l'enquête publique sur le SRC d'Occitanie

Contribution EELV Midi-Pyrénées à l’enquête publique relative au Schéma Régional des Carrières Occitanie

Après consultation des documents mis à disposition, EELV Midi-Pyrénées émet un avis défavorable au Schéma Régional des Carrières d’Occitanie.  Le SRC Occitanie est un dossier majeur pour la région et l’ensemble des territoires qui la compose. Il porte de multiples incidences sur une pluralité d’enjeux. Aussi, EELV Midi-Pyrénées regrette que l’enquête publique soit conduite durant la période estivale, du 3 juillet au 7 août 2023, au moment où les personnes et les organisations sont le moins à même de pouvoir déposer une contribution.

Le SRC Occitanie prévoit l’extension, le renouvellement et la création de nouvelles carrières pour extraire 15 millions de tonnes de granulats supplémentaires en 2031, soit environ un tiers de la consommation constatée en Occitanie.

Si le travail de consolidation et de mise en perspective régionale peut être salué, force est de constater que les orientations et mesures associées s’inscrivent dans une logique économique productiviste.

Les mesures du SRC sont déclinées de manière à faciliter au maximum l’accès aux 15 millions de tonnes de granulats visés en 2031 privilégiant l’activité économique et l’accès aux ressources naturelles sans intégration effective des impératifs climatiques et de biodiversité.

En effet, les mesures sont de l’ordre de la préconisation, d’encouragements à, d’incitation, de communication, de simples rappels sans garantie d’effectivité. Elles ne contiennent ni prescription ni obligation, renvoyant à un examen projet par projet, ouvrant ainsi la porte à de possibles dérives disséminées sur le territoire. Ce projet semble donc être d’un autre temps sans prendre en compte les enjeux contemporains.

Un SRC productiviste qui fait la part belle aux grands projets : 

  • Le scénario retenu est le scenario tendanciel (1-B) qui conduit à une évaluation des besoins en granulats à 42,4 millions de tonnes en 2031. Le scenario réduit (2-B), qui intègre la sobriété selon les prospectives de l’Ademe avec une réduction de 10%, est très vite évacué pour des raisons de pure considération, non objectivées. Nous le déplorons car il permettrait de faire une économie d’au moins 4,3 millions de tonnes de granulats chaque année. Ce choix est dommageable pour la préservation des ressources naturelles, pour la biodiversité, pour les paysages, pour la lutte contre le dérèglement climatique. Les éléments du dossier indiquent que le scénario réduit n’a pas été instruit avec l’approfondissement nécessaire. L’examen approfondi de la sobriété est d’autant plus pertinent que selon le rapport de l'Unicem, en Occitanie, la consommation de ressources en granulats en Occitanie est nettement plus élevée qu’en France : 7,3 t/habitant pour une moyenne nationale à 5,2 t/habitant, soit 40% plus élevée.

  • Les grands projets pourvoyeurs de besoins accrus en ressources naturelles n’ont pas été questionnés dans le dossier. Le besoin en granulats sur la période 2019-2031 est poussé par les grands projets de la région à raison de 2 millions de tonnes de granulats en moyenne par an. La LGV Toulouse-Bordeaux (partie Occitanie) et l’autoroute Toulouse-Castres en constituent 50% (12,5 millions de tonnes pour 25 millions de tonnes au total). Le projet de Port la Nouvelle requiert 4 millions de tonnes. Pourtant, à aucun moment dans le dossier, ces besoins ne sont questionnés. Aucun travail d’évitement total ou partiel des grands projets n’est présenté. Ils sont considérés comme acquis alors que l’opposition sociétale est de plus en plus forte compte-tenu du contexte climatique et des recommandations du Giec. La réévaluation des grands projets constitue une possibilité de réduction des besoins et de la préservation des ressources, ces marges de sobriété doivent être considérées dans le dossier.

  • Les filières alternatives dans la construction des bâtiments sont insuffisamment prises en compte. Pourtant des matériaux tels que la terre crue, le bois, la paille pourraient permettre une diminution de l’usage du béton dans la construction et répondraient aux enjeux écologiques. L’étude des documents de l’enquête publique laisse penser que l’utilisation de ces matériaux et donc la possible économie en béton qui en résulterait n’a pas été intégrée.

  • S’il mentionne une priorisation au renouvellement et à l’extension, le SRC ne fixe aucune stratégie d’évitement ou de réduction des projets de carrières pour les créations. Le SRC doit définir les obligations liées à l’« Évitement » d’un projet de carrière pour ne pas favoriser des projets priorisant la compensation, puis la Réduction avant de Compenser. En ce sens, les bassins fortement pourvoyeurs (Haute-Garonne, Ariège, Tarn et Garonne) vont subir de pleins fouets les impacts néfastes de nombreux nouveaux sites d’exploitation. Ce qui conduira à accroitre les inégalités territoriales.

  • Notons aussi que le SRC ne rend pas obligatoire la remise en état des sites d’exploitation (carrières) après fermeture.

Une gestion des déchets à revoir notamment en Ariège :

  • Il faut souligner positivement la prise en compte des objectifs du Plan régional de prévention et de gestion des déchets dans le SRC. Toutefois, cela appelle plusieurs remarques :
  • La note de synthèse du dossier mentionne un objectif de ressources secondaires de 12% en 2031. S’il a le mérite d’exister, nous déplorons cet objectif peu ambitieux pour 12 années de temps et l’absence d’obligations en ce sens pour les professionnels du secteur.
  • La valorisation des déchets s’entend par recyclage, enrobage et comblement des carrières. Dans un contexte où de nombreux sites vont fermer, nous souhaitons que les modalités de remise en état des sites soient reconsidérées. Les matériaux de comblement peuvent être en contact avec la nappe phréatique et dégrader la qualité de l’eau, le suivi piézométrique n’a jamais empêché en rien les pollutions.
  • Il est cependant problématique de ne pas remettre en cause l’enfouissement des déchets du BTP dans les nappes. Celle-ci est en effet fortement polluée par les matériaux qui se décomposent. Cela a des conséquences non seulement sur la santé des personnes qui vont boire cette eau, mais aussi sur les cultures qui vont être arrosées avec cette eau. Par ailleurs rien ne remplacera le fonctionnement naturel de l’écoulement de l’eau.

Un manque de prise en compte des enjeux climatiques et liés à l’eau et à la biodiversité :

  • Le SRC est très insuffisant dans l’intégration des enjeux climatiques. Par exemple, il ne fixe aucun objectif concret en termes de transfert modal vers le fret et le fluvial bassin par bassin alors que le transport routier constitue 95,5% des déplacements.

  • Le SRC ne tient pas compte des enjeux de biodiversité. Seules les zones définies en niveau 1 sont protégées et elles sont très peu nombreuses. Plusieurs contributions des services consultés par l’autorité environnementale soulignent l’insuffisance des niveaux d’enjeux en termes de biodiversité. Ainsi, les corridors écologiques (trames vertes et bleues notamment), les réservoirs écologiques, les Znieff, les zones Natura2000 ne font l’objet d’aucune limite, d’aucune prescription. Les zones Natura 2000 sont classées en niveau 3 ce qui est loin d’être cohérent avec les enjeux écologiques et 125 sites pourraient être impactés par les gisements d’intérêt, les renouvellements ou extensions de carrière ce qui pourrait clairement leur porter atteinte. C’est donc la quasi-totalité des enjeux de biodiversité qui ne sont pas pris en compte. Le Schéma Régional des Carrières de la région Occitanie n’est pas cadrant et pas protecteur des milieux (surtout si des carrières peuvent voir le jour sur les trames vertes et bleues, dans des espaces bénéficiant de protections fortes, ou encore dans les Parcs Naturels Régionaux). Il nous paraît donc nécessaire de renforcer le volet biodiversité, au nom d’une cohérence entre les politiques publiques affichées. D’ailleurs, nous avons remarqué que les enjeux du vivant sont portés comme des contraintes. Ce document porte donc le point de vue des carriers et est défaillant dans son approche systémique de l’intégration de l’ensemble des parties prenantes.

  • Concernant le risque de destruction de terres agricoles, aucune mesure n’est prévue. Un simple suivi est mis en place. Le SRC doit intégrer des mesures prescriptives de protection des sols agricoles. Il en va de même pour les espaces forestiers dont la destruction est rendue possible.

  • Le SRC n’apporte aucune protection de la ressource en eau, bien au contraire puisque les 15 millions de tonnes supplémentaires à trouver vont inévitablement se traduire par la création de nouveaux sites alluvionnaires. La multiplication des carrières alluvionnaires va amplifier les dommages déjà constatés notamment dans les zones géographiques fortement contributrices : Haute-Garonne, Ariège et Hautes-Pyrénées qui produisent deux tiers des granulats alluvionnaires de l’Occitanie. Les gravières assèchent les nappes phréatiques par évaporation, les déchets du BTP polluent les nappes quand ils sont utilisés pour combler les carrières. Les moratoires à l’ouverture de nouvelles carrières obtenus dans certains départements comme l’Ariège seront supprimés. Le SRC doit fixer des prescriptions et obligations qui protègent la qualité de l’eau dans un contexte de raréfaction.

Des avis négatifs de la part des territoires : 

  • Remarquons que sur 52 EPCI ou SCOT ayant répondu, seulement 24 portent un avis favorable dont 8 avec observations. Les avis défavorables et les réserves sont donc très nettement majoritaires. C’est assez inhabituel pour être souligné. Cela traduit les insuffisances du dossier et un doute des territoires sur les orientations et mesures portées par le SRC.

  • Le SRC sera opposable aux documents d’urbanisme territoriaux (SCOT, PLUi) qui devront être mis en conformité dans un délai non précisé. Ainsi, les marges de manœuvre territoriales sont réduites pour accepter ou non un projet qui s’imposera de facto par décision préfectorale. L’accès aux ressources naturelles est ainsi sécurisé sans discernement des enjeux pluriels des territoires.

Europe Ecologie les Verts Midi-Pyrénées souhaite que les points ci-dessus soient travaillés et puissent conduire à une évolution du SRC qui intègre la sobriété positive, la protection de la biodiversité et de la ressource en eau, les enjeux majeurs de lutte contre le dérèglement climatique, la préservation des ressources pour les générations futures.