[TARN] A69 - Lettre ouverte à Christophe Ramond, Président du Conseil départemental du Tarn

Suite à une tribune du Président du Conseil départemental du Tarn sur l'autoroute, EELV Tarn lui répond.

Monsieur le Président,

Vous reconnaissez que, dans le Tarn, des zones rurales sont dépourvues de moyens de transports collectifs pour se déplacer. La solution que vous préconisez est la voiture, mais quid de l'investissement dans des mobilités plus douces, alors que le changement climatique et les objectifs, dans le cadre de la transition écologique, nous y obligent et que l'Etat français est déjà condamné pour inaction climatique.
Le plus surprenant est que vous mettez en avant le projet d'autoroute dans un souci de sécurité. Plusieurs familles sont endeuillées à cause d'accidents sur la route nationale bordée par des platanes, dites-vous. Faudra t-il abattre tous les arbres en bordure des routes alors qu'ils sont indispensables pour réguler les températures et sont une solution à notre problème de manque d'eau ? Ne faudrait-il pas plutôt sécuriser cette route nationale ?

Vous abandonnez donc la sécurisation de la nationale qui restera présente et utilisée en parallèle de l'autoroute, sans compter qu'il faudra retraverser les villages de Soual et Puylaurens déjà reconnus comme accidentogènes par le passé, d'où les contournements déjà réalisés.
Une route nationale qui continuera d'être utilisée (dans l'éventualité de la réalisation finale de cette A69) par les automobilistes qui n'auront pas les moyens de débourser 17€ pour utiliser cette autoroute. Les citoyen·ne·s qui ne pourront pas prendre l'autoroute n'ont donc pas, d'après vous, tous le même droit à la sécurité?

Vous mettez en avant la création d'emplois, environ un millier, grâce à l'autoroute, mais combien seront maintenus à la fin du chantier ? Quels emplois et dans quelles conditions ? Il n'y a rien de probant à avancer un nombre d'emplois invérifiable, mais nous pourrions aussi parler des milliers d'emplois que l'aménagement de l'existant pourrait créer, ainsi que tout ce qui est en rapport avec l'aménagement des terres agricoles et des services de proximité, la transition écologique ou les énergies renouvelables.

Pouvez vous nous garantir que les emplois éventuellement créés, le seront dans la grande couronne castraise et non pas dans celle autour de Toulouse? Une étude de chercheurs de l'université Champollion d'Albi, prouve qu'une autoroute n'a jamais ramené de l'emploi localement mais bien que ce sont les métropoles qui en ont profité.

Prenez-vous la responsabilité d'indiquer que cette étude académique n'a pas de valeur ?
Prenez-vous le risque qu'au final le sud du Tarn perde des emplois au profit de la métropole toulousaine ?
Combien faudra-t-il encore d'hectares de terres agricoles, autour de l'autoroute pour construire les ZAC que vous souhaitez ?

Vous nous dites que toutes les alternatives ont été étudiées, mais pouvez vous nous en parler plus précisément ? Une pré-étude a été déposée dans l'enquête publique mais n'a jamais été examinée, seul le projet d'autoroute a été mis en avant. Une autre étude alternative, portée par un collectif de citoyens, mérite sans doute que l'on s'y arrête. Quels sont les services qui auraient émis des conclusions négatives sur des alternatives non étudiées ? Où sont ces conclusions ?

La qualité de vie des populations et l'attractivité du territoire passe sans doute, par autre chose que de multiples pollutions, de l'air, de l'eau et sonores. Les usines à bitume prévues pour le goudronnage polluent sur 10 Km alentour, l'exploitation des gravières, pour faire les routes et l'autoroute A69, en Ariège polluent les sols et l'eau des nappes phréatiques pour des décennies, alors que des villages entiers sont en manque d'eau potable. Ce que vous proposez n'est pas un avenir désirable pour nos populations et nos générations futures.
Pour ce qui concerne les arbres centenaires qui sont en cours de destruction, vous proposez que l'on en plante 5 fois plus. Mais un arbre centenaire ne peut être intégralement remplacé par de jeunes arbres. Le réchauffement climatique que nous vivons actuellement et les températures élevées accentuent le manque d'eau et seulement 10% de jeunes arbres plantés pour compenser d'autres chantiers, survivent.
Les arbres n'ont pas qu'une vocation à faire de l'ombre, mais ils participent aussi à la vie de toute la biodiversité du sous-sol, des sols, de l'eau et de l'air. Nous vous renvoyons à l'étude des 200 scientifiques toulousains qui se sont prononcés contre ce projet.
Vous voulez diminuer le nombre de voitures sur les routes, et dans le même temps vous reconnaissez que la voiture est nécessaire parce qu'il n'y a pas assez de transports collectifs. ne serait-ce pas un paradoxe ?
Vous reprenez à votre compte la proposition du collectif "la voie est libre" de réaliser une véloroute. C'est intéressant, mais une véloroute, juste en parallèle de l'autoroute, sans aucun projet pour savoir ce qu'on en fait, ce n'est pas suffisant.
Vous voulez démontrer que vous agissez avec conscience environnementale, au moment où la société ATOSCA agit en dehors du droit en abattant des arbres d'alignement centenaires, où cette autoroute traversera une zone Natura 2000, et une zone humide qui sera asséchée définitivement.
Vous dénigrez les travaux de chercheurs, scientifiques, mais aussi la parole de citoyen·ne·s et d'élu·e·s opposé·e·s à ce projet. La condescendance n'est pas du côté des lanceur·euse·s d'alerte mais bien de celles et ceux qui s'accrochent à un projet d'un autre siècle, destructeur du vivant et qui impacte des centaines d'hectares de terres fertiles, en donnant des leçons de démocratie et de droit. C'est bien là que se trouve le mépris d'élu·e·s qui se croient au-dessus de la loi pour un projet climaticide.
Si vous êtes si sûrs de vous, attendez donc les résultats des recours déposés en justice et leurs conclusions et faites en sorte que ce projet soit suspendu en attendant. Cela fait 30 ans qu'il est dans des cartons, il peut attendre encore quelques mois.
Quand vous dites qu'une très large majorité de Sud Tarnais réclament cette autoroute, vous n'apportez pas la preuve de cela, car si on regarde les conclusions de toutes les commissions et des enquêtes publiques, c'est l'inverse qui est démontré. Seulement dans l'enquête environnementale, c'est 90% d'avis défavorables dans les contributions et les conclusions de l'enquête sont négatives pour ce projet.
Contrairement à ce que vous avancez, tous les élu·e·s ne sont pas pour l'autoroute, ou alors vous supposez que les avis des populations tout au long du tracé et les élu·e·s de ce territoire ne comptent pas, et c'est un problème démocratique majeur.
Non, Monsieur le Président, toutes les étapes de la vie démocratique n'ont pas été franchies, et surtout n'ont pas été prises en compte comme démontré ci dessus. Il reste encore les recours juridiques à examiner, la justice n'a donc pas encore tranché. La vie démocratique ne se résume plus aux élections, tous les 4-5-6… ans, la vie démocratique doit vivre au quotidien. La mobilisation contre ce projet et pour une alternative est lancée depuis plusieurs années. Elle ne faiblit pas et se renforce au contraire. Diriez-vous que cette mobilisation est illégale et déplacée?
Nous devons tirer les leçons du changement climatique en cours et prendre au sérieux les études scientifiques qui démontrent depuis longtemps que nous allons devoir organiser nos modes de vie différemment pour atténuer les impacts du réchauffement et du manque d'eau.
A votre question "quel monde préparons-nous à nos enfants si la démocratie n'est plus respectée ?”, nous vous répondons, "quel monde préparons-nous à nos enfants si nos décideurs ne respectent pas la loi et s'ils n’oeuvrent pas pour laisser un monde plus vivable?", "Quel monde préparons-nous à nos enfants si nous continuons de construire des autoroutes alors que la planète est en surchauffe ?".
Nous proposons une autre vision du monde de demain. Nous souhaitons un Tarn résilient, tourné vers l'avenir, qui mise sur l'innovation plutôt que sur des modèles anciens.
Nous restons ouverts au dialogue, persuadés que nous pouvons tracer un chemin d'avenir pour notre beau département.
Vous nous dites que le temps de la discussion est terminé ? Nous vous répondons :

Le combat pour un Tarn écologique ne fait que commencer.


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